La doctrine des bonnes intentions by Chomsky Noam

La doctrine des bonnes intentions by Chomsky Noam

Auteur:Chomsky,Noam [Chomsky,Noam]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: 10-18
Publié: 2006-04-01T13:57:26+00:00


6.

La doctrine des bonnes intentions

Cambridge, Massachusetts (30 novembre 2004)

Vous avez évoqué dans vos écrits la « doctrine des bonnes intentions ». De temps à autre, la politique américaine est entachée par les légendaires « mauvais sujets » et « erreurs tragiques », mais fondamentalement l’histoire de notre bonté continue sans interruption.

L’analyse courante, dans les travaux scientifiques comme dans les médias, veut qu’il y ait deux tendances en conflit dans la politique étrangère des États-Unis. La première est ce qu’on appelle l’ » idéalisme wilsonien », qui est fondé sur des intentions nobles. L’autre est un sobre réalisme qui nous invite à prendre conscience des limites de nos bonnes intentions : parfois, ces nobles idées ne peuvent se concrétiser convenablement dans le monde réel. Il n’y a que ces deux options-là.

Ce n’est pas seulement aux États-Unis que l’on voit cela. Prenez l’Angleterre. Le Financial Times de Londres est probablement le meilleur journal du monde. Il y a quelques jours, il a publié un article très critique sur la politique américaine, signé par l’un de ses principaux éditorialistes, Philip Stephens. Le problème, selon lui, c’est que la stratégie des États-Unis est exagérément dominée par l’idéalisme wilsonien. Il faudrait quelques gouttes de « réalisme à la tête froide » pour tempérer cet ardent dévouement à la démocratie et à la liberté[143].

On ne peut plus douter, poursuit Stephens, que George Bush et Tony Blair sont motivés par leur vision et par leur foi dans la démocratie et les droits humains. Nous le savons parce qu’ils l’ont dit, ce qui le prouve. Mais nous devons être plus réalistes qu’eux : si Bush et Blair se sont voués à ce que la presse appelle « la vision messianique de Bush qui veut greffer la démocratie sur le reste du monde », les Irakiens et les autres peuples du Moyen-Orient, comprenons-le, ne sont peut-être pas capables de s’élever jusqu’aux sommets que nous avons prévus pour eux[144].

Quand les prétextes de l’invasion de l’Irak se sont effondrés – aucune arme de destruction massive, aucun lien entre Al-Qaïda et l’Irak, aucun rapport entre l’Irak et le 11 septembre –, les rédacteurs des discours de Bush ont dû trouver du nouveau. C’est alors qu’ils ont inventé sa vision messianique –apporter la démocratie au Moyen-Orient. Quand Bush a prononcé le discours où il annonçait sa nouvelle vision, le principal commentateur du Washington Post, David Ignatius, rédacteur et correspondant respecté, a bien failli tomber à la renverse d’admiration sacrée. Il a défini la guerre d’Irak comme « la plus idéaliste des temps modernes – une guerre dont la seule justification cohérente, malgré tout le battage fallacieux sur les armes de destruction massive et les terroristes d’Al-Qaïda, est d’avoir abattu un tyran et créé la possibilité d’un avenir démocratique ». Cette vision d’un « avenir démocratique » est impulsée, selon Ignatius, par l’ » idéaliste en chef », Paul Wolfowitz, qui, de tous les membres de l’administration, a probablement le passé le plus extrémiste de haine passionnée de la démocratie. Mais ça ne compte pas.



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